Les commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale

En Belgique, les commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale constituent un événement mémoriel d’une ampleur sans précédent. Elles s’ancrent à tous les niveaux de pouvoir (communal, provincial, régional, communautaire, national, européen et international), ainsi que dans la sphère familiale. Elles concernent tant la recherche scientifique que la vulgarisation à destination du grand public et le « devoir de mémoire ». Elles prennent de multiples atours : expositions, reconstitutions historiques, publications, hommages, parcours touristiques, collectes d’archives privées, etc. En outre, elles présentent la caractéristique inédite de porter sur l’ensemble de la période de guerre, et non sur la seule fin des affrontements.

L’architecture institutionnelle du pays a des impacts directs sur le programme des commémorations. En effet, si les différentes composantes de l’État fédéral participent toutes au mouvement, elles œuvrent de manière distincte. C’est dès lors une perspective de compétition, et non de collaboration, qui prévaut entre elles. Seules la Région wallonne et la Communauté française se sont réunies au sein d’un projet commun. Par ailleurs, les commémorations n’ont pas l’Autorité fédérale pour principal moteur et acteur : au contraire, celle-ci a largement laissé le champ du souvenir aux Régions et aux Communautés.

La conséquence directe de cette atmosphère de concurrence et de ce désinvestissement du pouvoir central réside dans un risque de fragmentation accrue de la mémoire de la Grande Guerre. De part et d’autre de la frontière linguistique, chacun réécrit son histoire séparément, selon des perspectives sensiblement différentes ; au Nord, le projet répond ainsi à la volonté affirmée de renforcer l’identité flamande. Tel est l’un des multiples enjeux que met en lumière le présent Courrier hebdomadaire.

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